Les missions légales du CAC, au-delà du contrôle des comptes

La Mission légale du CAC

Sous l’égide du Ministère de la Justice, le Commissaire aux Comptes est garant de la fiabilité de l’information financière et comptable produite par les entreprises. Il est obligatoire de nommer un CAC dans un certain nombre de cas définis par la loi. La nomination d’un CAC peut également relever d’une démarche volontaire de l’entreprise.

Le CAC n’a pas pour mission de dupliquer le travail de l’Expert-comptable et contrairement à ce Confrère, il n’a absolument pas le droit de conseiller les Dirigeants. Sa mission vient compléter avantageusement celle de l’expertise comptable, intégrant dans sa démarche une analyse en amont du contrôle interne, une participation aux inventaires de clôture et ayant l’avantage de pouvoir étudier le circuit des données à leur source et de diffuser des recommandations pouvant permettre d’en améliorer la sécurité.

Nommé pour un mandat de 6 ans, la démarche du Commissaire aux Comptes est encadrée par le Code de Commerce et un certain nombre de Normes Professionnelles. Elle se structure autour des missions suivantes :

Certification des comptes annuels

À chaque clôture d’exercice, le CAC entre dans une démarche de contrôle dont l’issue normale est de certifier que les comptes annuels donnent une image sincère, régulière et fidèle du résultat, de la situation financière et du patrimoine de l’entreprise.

Contrôle complet et permanent

Tout au long de son mandat, le CAC effectue toute vérification ou contrôle qu’il juge utile à sa mission d’analyse des comptes, des processus internes ou des systèmes d’information. Il a donc une mission continue et étendue organisée au fil de l’exercice comptable.

Devoir d’information

Le CAC communique les résultats des contrôles aux dirigeants et associés via ses rapports annuels. L’Entité a également des obligations d’informations envers le CAC.

En savoir plus sur cet engagement réciproque →

Prévention des difficultés

S’il perçoit des signes pouvant compromettre la continuité de l’activité, le CAC doit informer la Direction, et peut déclencher une procédure d’alerte auprès du Tribunal de Commerce.

En savoir plus sur la prévention des difficultés →

Révélation des faits délictueux

En cas de détection de faits délictueux, le CAC doit en informer le Procureur de la République, qui sera à même de les qualifier juridiquement et d’engager des poursuites.

Voir le rôle du CAC contre le blanchiment →

Interventions spécifiques

Le CAC intervient aussi dans certains cas spécifiques : opérations relatives aux capital et aux actions, transformation, commissariat aux apports, à la fusion, etc. Il peut également intervenir à la demande de l’entité dans le cadre des Diligences Directement Liées.

En menant à bien sa mission, le Commissaire aux Comptes engage sa responsabilité sur différents plans :

Responsabilité
civile
Soumis à une obligation de moyens, toute faute ou négligence dans l’exercice de ses fonctions peut engager sa responsabilité civile.
Responsabilité
pénale
Sa responsabilité pénale pourrait être engagée s’il viole le secret professionnel, ne révèle pas des faits délictueux, ne se retire pas en cas d’incompatibilité ou émet en connaissance de cause un rapport inexact.
Responsabilité disciplinaire Le cas échéant, le CAC peut avoir à rendre compte à la Chambre Régionale de discipline de la CRCC, voire au Haut Conseil du Commissariat aux Comptes.
Responsabilité administrative Dans le cas de sociétés cotées, le CAC rend également compte à l’Autorité des Marchés Financiers.
Responsabilité sociale d’entreprise Le CAC peut être amené à signer certains rapports de responsabilité sociale ou de développement durable.

Ainsi encadrée, la mission du Commissaire aux Comptes a donc un intérêt économique fort :

  • elle augmente la confiance dans l’information financière communiquée dans les comptes
  • elle est d’intérêt public et apporte de la transparence dans le fonctionnement des organisations
  • elle permet de crédibiliser l’information financière diffusée aux parties prenantes

Le Commissaire aux Comptes est aussi régulièrement contrôlé par ses pairs. En moyenne tous les cinq ans, le CAC est contrôlé par la Compagnie Régionale des Commissaires aux comptes dont il dépend ; selon la composition des mandats détenus par le CAC, ce contrôle peut être opéré par le H3C, haut organe de contrôle dépendant du Ministère de la Justice.

Le processus d’audit et de contrôle

Les prérogatives du CAC sont très larges et légitimées à la fois par un cadre législatif dense et par un engagement de transparence réciproque fort avec l’entité contrôlée.

Le CAC dispose en particulier :

  • du droit d’être informé : l’entité est tenue de lui mettre à disposition les comptes annuels, le rapport de gestion, les comptes consolidés, et de le convier aux réunions du CA ou du directoire arrêtant les comptes, de toutes les Assemblées Générales d’Associés ou d’Actionnaires les approuvant
  • du droit d’investigation : le CAC peut se faire communiquer à tout moment les comptes sociaux, les documents de société, etc

Ces droits se matérialisent lors des différentes étapes du processus d’audit aussi bien à travers les travaux du CAC en eux-mêmes qu’à travers un ensemble de documents formalisés, tels que la lettre de mission.

Acceptation, Lettre de mission et Lettre d’affirmation

exemple de lettre de mission du commissaire aux comptes

Exemple de lettre de mission

La Lettre d’Acceptation confirme la démarche préliminaire du Commissaire Aux Comptes quant à sa prise de connaissance de l’Entité et sa rencontre avec la Direction.

La Lettre de Mission, émise par le CAC, est un véritable contrat entre l’Entité contrôlée et l’Auditeur légal. Elle organise les relations entre l’Entité et le CAC, ainsi que le programme de travail d’audit.

La Lettre d’Affirmation quant à elle, permet de rappeler l’engagement du Dirigeant sans aucunement en aggraver la responsabilité.

Les Dirigeants sont amenés à signer la Lettre de mission et la Lettre d’affirmation. Par conséquent, l’Entité contrôlée va avoir un certain nombre d’obligations à l’égard du CAC :

  • Obligations générales : l’Entité ne doit pas faire obstruction à la mission du CAC et doit lui communiquer tous les documents nécessaires à la formation de son opinion, l’informer de toutes les conventions réglementées
  • Obligations d’informations financières : l’Entité est soumise à une obligation de communication des comptes annuels et, en fonction des seuils de l’entité, des comptes prévisionnels.
  • Obligations juridiques : l’Entité est tenue de communiquer le juridique (dont le rapport de gestion) au CAC, et doit également le convoquer au Conseil d’Administration (ou organe assimilé) ainsi qu’aux Assemblées Générales

Dans certains cas, la non-transmission ou la transmission tardive de documents va obliger le CAC à émettre un Rapport de Carence. C’est par exemple le cas lorsque la Loi sur la prévention des difficultés des Entreprises du 1er Mars 1984 ne peut être mise en oeuvre, notamment par l’absence d’obtention des comptes prévisionnels.

Prise de connaissance et évaluation des risques

La phase de prise de connaissance est très importante ; c’est à ce stade que vont se tisser les premiers rapports de confiance avec l’Entité, et que le Commissaire aux Comptes sera par la même amené à récolter un maximum d’informations sur le fonctionnement de l’entreprise, ce afin de mener une mission efficace et exhaustive.

C’est également à ce stade que le CAC va prendre connaissance des procédures de contrôle interne qui vont lui servir dans sa démarche d’audit, et qu’il va évaluer les risques au sein de l’entité contrôlée, ce afin d’orienter ses contrôles sur les points sensibles.

Ainsi éclairé, le Commissaire aux Comptes va alors pouvoir établir un programme de travail et un plan de mission qui prennent en compte les spécificités de l’entité, en insistant sur les points complexes qu’il aura pu identifier en amont.

Focus sur la prévention des difficultés :

Si le CAC perçoit des signes pouvant compromettre la continuité de l’activité, il doit informer la Direction, avoir un échange avec l’Entité lui montrant la prise de conscience des difficultés et l’existence et la pertinence des mesures envisagées ; le cas échéant, il peut être amené à en informer le Conseil d’Administration. Si des mesures efficaces ne sont pas décidées pour améliorer la situation, il doit informer de ses démarches le Président du Tribunal de Commerce ou du Tribunal de Grande Instance, selon le cas. Qu’elle révèle un dysfonctionnement dans une procédure interne ou qu’elle soit de nature purement comptable, la procédure d’alerte, fait du Commissaire aux comptes un des moteurs d’anticipation des difficultés de la conduite des affaires.

Le Commissaire aux comptes se doit d’être vigilant, la Loi l’y oblige ; il a le devoir d’anticiper et de prévenir des difficultés des entreprises. Il a donc un rôle rassurant pour l’ensemble du monde économique. Cependant ce rôle est délicat à mettre en œuvre car il se doit d’être :

  • réactif afin de permettre au Dirigeant de mettre en œuvre des actions correctrices et
  • juste dans son jugement et dans le choix pertinent des informations.

Le Commissaire aux comptes doit donc également faire preuve de discernement et de courage pour révéler une situation délicate de l’entreprise que le Dirigeant pressent, mais se cache parfois ou minimise peut-être. Le Commissaire aux comptes doit alors amener le Dirigeant à s’interroger sans l’obliger, dialoguer sans paraître inquiet, demander des éclaircissements sans froisser.

Mise en oeuvre du processus d’audit

Le Commissaire aux Comptes va mettre en oeuvre le processus d’audit dans le strict respect d’un ensemble de Codes, Normes et Lois qui encadrent sa mission. En particulier, il est tenu de travailler en accord avec le Code de déontologie ainsi que les Normes d’Exercice Professionnel.

Tout au long de son mandat, le CAC effectue ainsi toutes vérifications ou tous contrôles qu’il juge utiles à sa mission, des processus internes ou des systèmes d’informations, d’assistance aux inventaires physiques, de confirmation directe des Tiers et d’analyse des comptes. Il a donc une mission continue et étendue répartie sur l’année.

Les moyens à sa disposition vont notamment être les suivants :

  • Assistance à l’inventaire physique
  • Analyse des procédures internes
  • Audit spécifique (informatique ; social…)
  • Confirmation directe des Tiers (Fournisseurs, Clients, Banques, Avocats…)
  • Contrôle des comptes annuels (dont la liasse fiscale et l’annexe légale)
  • Contrôle du juridique en amont de la tenue de l’AG (dont le rapport de gestion)
  • Lettre d’affirmation de la Direction et plus généralement, tout échange avec les Dirigeants.

La mise en oeuvre de ces moyens permet au CAC de se forger une opinion en son âme et conscience.

Focus sur la norme anti-blanchiment (NEP 9605) contre le blanchiment des capitaux
Extrait de la Revue Fiduciaire Comptable

Suite à la parution de l’ordonnance n° 2009-104 du 30 janvier 2009 relative à la prévention de l’utilisation du système financier aux fins de blanchiment de capitaux et de financement du terrorisme, les modalités d’application du dispositif anti-blanchiment par les commissaires aux comptes a été défini dans une norme d’exercice professionnel (NEP 9605). Cette norme, qui s’applique au commissaire aux comptes dès l’acceptation d’un mandat, au cours de l’exercice de ce dernier ainsi qu’au titre de missions entrant dans le cadre des diligences directement liées, concerne également les missions de commissariat à la transformation, aux apports ou à la fusion.

Pour répondre à son obligation de vigilance, le commissaire aux comptes doit procéder à l’examen des opérations réalisées par l’entité et à l’identification de l’entité et du bénéficiaire effectif de la prestation. Si il n’est pas en mesure de le faire, il ne doit pas accepter le mandat ou ne doit pas le poursuivre si celui-ci est en cours.
La norme précise également les opérations pouvant être à l’origine d’une déclaration de soupçon, les modalités de déclaration à TRACFIN, notamment en ce qui concerne les signataires de la déclaration, et les interactions avec la révélation des faits délictueux.

Enfin, elle rappelle que les commissaires aux comptes doivent mettre en place les procédures et les mesures de contrôle interne définies par le Haut conseil du Commissariat aux comptes (H3C) : nomination des personnes ad hoc, classification des risques, procédures d’évaluation des risques au sein de l’entité.

Remarque : dans ce cadre, le Commissaire aux Comptes est notamment amené à collecter une pièce d’identité des Dirigeants.

Finalisation, Rapport du CAC et Formulation de l’opinion

Le CAC communique le résultat de ses investigations en employant deux types d’approches :

  • Communication interne auprès des Dirigeants de l’entité en rendant compte des contrôles réalisés (recommandations sur le contrôle interne et synthèse des contrôles comptables)
  • Communication externe auprès des Associés et/ou Actionnaires par le seul biais de ses rapports annuels. Ainsi, lors de l’Assemblée Générale, le CAC fait la lecture de son rapport général sur les comptes annuels et éventuellement de son rapport spécial au titre des conventions réglementées.

C’est dans le rapport général que le Commissaire aux Comptes va formuler son opinion sur les comptes. C’est sur la base de ce rapport que l’Assemblée Générale de l’Entité peut se prononcer sur l’approbation des comptes qui lui est proposée. Ce rapport sera ensuite déposé au Greffe du Tribunal de Commerce avec les comptes annuels.

En pratique, le rapport général est structuré comme suit :

Première Partie Le Commissaire va rappeler le contexte d’intervention – notamment le fait que les comptes ont été arrêtés par la Direction de la société – et établir son avis sur les comptes. C’est donc dans cette partie qu’il va selon les cas :

  • certifier les comptes sans réserve
  • certifier les comptes avec réserve
  • signifier l’impossibilité de certifier les comptes
  • ou refuser de certifier les comptes

Le CAC a la possibilité d’effectuer des observations complémentaires à ce niveau du rapport, bien que la justification de son opinion soit détaillée dans la seconde partie.

Deuxième Partie C’est dans cette seconde partie que le Commissaire aux Comptes pourrait justifier en détail son appréciation. On retrouverait notamment ici des explications détaillées sur pourquoi les contrôles réalisés et les éventuelles anomalies relevées ont amené le CAC à formuler telle ou telle opinion.

Les analyses pourront par exemple être regroupées par cycle, un « cycle » consistant en un ensemble d’opérations relevant d’une même problématique comptable, comme :

  • le cycle achats-fournisseurs, relatif aux opérations d’approvisionnement et de suivi des dettes fournisseurs
  • le cycle ventes-clients, relatif aux opérations de ventes et de suivi des postes de créances clients
  • le cycle trésorerie, relatif aux opérations de banque et aux dénouements
  • etc
Troisième Partie Enfin, une troisième partie du rapport va concerner des vérifications spécifiques effectuées par le Commissaire aux Comptes, et notamment le rapprochement de son analyse avec les informations données par les organes de Direction au sein du rapport de gestion. L’objet de cette troisième partie est également de détailler les inexactitudes ou irrégularités recensées lors de la mission.

C’est donc en fin du processus d’audit légal, à travers le rapport général, qu’émerge l’opinion du Commissaire aux Comptes, qui prendra l’une des formes suivantes :

Certification sans réserve Le CAC certifie sans réserve s’il n’a relevé aucune anomalie ou si les désaccords restants sont non-significatifs, et qu’il n’a pas été limité dans ses vérifications
Certification avec réserve Le CAC certifie avec réserves si des désaccords ou des limitations dans ses travaux subsistent mais ne suffisent pas à remettre en cause la régularité, la sincérité, et l’image fidèle des comptes.
Impossibilité de certifier Le CAC ne peut émettre une opinion et ne peut par la même pas certifier, car l’accumulation des limitations dans ses vérifications est trop importante.
Refus de certification Le CAC refuse de certifier quand les limitations dans ses travaux et les désaccords sont tels qu’ils remettent en cause la sincérité, la régularité et l’image fidèle des comptes.